LE JINBA ITTAI
Le 9 février 1989,
Mazda dévoilait son modèle MX-5 (Miata aux USA) au salon automobile de Chicago et marquait l'histoire
en relançant la mode des roadsters légers, considérée comme révolue. Pilotes amateurs
ou simples conducteurs en quête de sensations, le Mazda MX-5 a su les séduire
par son plaisir de conduite. Arrivée en Europe depuis peu, la Mazda MX-5
troisième génération semble en mesure de pouvoir prolonger la brillante carrière
d'une recette gagnante...
Texte : Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
A ce jour, Mazda a produit près de 725 000 unités de son
petit roadster, dont 431.506 MX-5 Miata 1ère génération.
Roadster et voiture de sport d'entrée de gamme à prix abordable, la Mazda MX-5
est devenu à travers le monde une vraie icône dont le succès a dépassé
les prévisions les plus optimistes, loin de devant ses rivales du moment qu'étaient
la MGF et la BMW Z3.
Un engouement tel que Mazda ne put répondre à la demande européenne depuis
le Japon. Impatients, certains clients décidèrent d'importer des MX-5 par eux-mêmes.
Aujourd'hui, ces modèles se reconnaissent au logo Miata figurant sur leur face
arrière, tel l'emblème d'une société secrète. En France le phénomène
est moins perceptible, en effet sur 10 Mazda MX-5 européens, 8 étaient
destinés à l'Allemagne et à l'Angleterre, deux contrées pourtant peu connues pour
leur temps ensoleillé... Avec son nouveau modèle, Mazda envisage de vendre
40 000 unités par an dans le monde. La majorité de la production est destinée
à l'Europe avec 18 000 unités. Fidèle à ses origines, le Mazda MX-5
3ème génération (NC) incarne lui aussi le "Jinba Ittai", un concept
japonais symbolisant l'osmose entre le cavalier et sa monture. Cette expression
vient du Yabusame, un art martial japonais consistant à enchaîner plusieurs tirs
avec un arc tout en galopant dans un passage. Pour que la flèche atteigne la cible,
le cavalier et sa monture ne doivent faire qu'un.
DESIGN
Le
mythique Mazda MX-5 n'avait subi qu'un restylage et plusieurs évolutions mineures
au cours de ses 16 années d'existence. Les trois studios de design de Mazda (Hiroshima
au Japon, Irvine en Californie et Oberursel en Allemagne) ont travaillé pendant
un an à la réalisation du design final de cette troisième génération. Pour ce
faire, le designer en chef Yasushi Nakamuta leur avait transmis des lignes directrices
: "Le nouveau MX-5 doit arborer des lignes ludiques et modernes tout en restant
fidèle au design d'origine. La nouvelle génération de MX-5 doit séduire l'Europe,
les Etats-Unis et le Japon." Au final, ce sont le design extérieur de l'équipe
d'Hiroshima et le design intérieur de l'équipe de Francfort qui furent retenus.
Près de 70 % du design final émane des idées japonaises, tandis que 30 % est dérivé
de la version européenne. Au premier regard, la nouvelle "mimix" est
immédiatement identifiable, mais paraît plus athlétique et développé. Chez Mazda
on lui attribut d'ailleurs un sexe masculin... alors disons "LE" MX-5.
La calandre arrondie est assez clairement dérivée de la première génération, tout
comme les rétroviseurs et les poignées de porte. De même, les feux arrière
ovales aux optiques arrondies ont aussi été repris sur le nouveau MX-5, mais avec
une finition high tech plus prononcée. De proportions comparables, le MX-5 NC est
désormais plus grand et plus gros, ce qui lui confère une présence plus affirmée
et plus athlétique. Il est ainsi 20 mm plus long, 40 mm plus large et 20 mm plus
haut que le précédent modèle. Ces nouvelles dimensions se combinent avec une augmentation
marquée de la largeur de voie, de 75 mm à l'avant et de 55 mm à l'arrière. Les
ailes proéminentes permettent aux jantes de 17 pouces (en série sur 2.0
Performance) de s'inscrire sans problème dans les passages de roues. La
voiture paraît même encore haute sur pattes magré l'amortissement
spot Bilstein dont elle est dotée. Les roues placées aux extrémités du
véhicule permettent au roadster de conserver son design compact, malgré un empattement
accru de 65 mm. Comme sur le BMW Z4, les arceaux
de dossier de siège reprennent la forme de la partie supérieure du dossier lui-même
et confèrent un look plus sportif. La capote manuelle simple épaisseur
peut toujours être ouverte et fermée d'une seule main à l'aide d'un mécanisme
central. A l'instar de la précédente version, en quelques secondes seulement,
sans sortir de la voiture, on peut déplier ou replier la bâche. Il
n'y a pas de couvre-capote à installer. Mazda a également optimisé les
joints de la capote, réduit le poids de la tringlerie et éliminé les vibrations
de la vitre arrière en conduite à grande vitesse sur autoroute. Le nouveau MX-5
est disponible en gris foncé métallisé, rouge, blanc, gris clair métallisé,
bleu métallisé (notre modèle d'essai), vert foncé
ou noir.
HABITACLE
L'habitacle à la fois simple et élégant de
l'actuel MX-5 a été profondément modifié. Sa conception a été
supervisée par Peter Birtwhistle, designer en chef au Centre de Design
Européen de Mazda à Oberursel en Allemagne. Outre la finition, l'équipe du design
intérieur devait privilégier la fonctionnalité, le confort et l'agrément. Les
flancs de la carrosserie ne se rétrécissant plus au niveau des portes, les passagers
disposent d'un habitacle plus spacieux offrant davantage de largeur aux hanches,
aux épaules et aux coudes, et, pour la première fois, d'airbags latéraux imposés
indirectement par les différents test de sécurité. Ceux qui
mesurent entre 1,50 et 1,86 m devraient s'y sentir bien. En outre, une première
sur le MX-5, le volant présente une course de réglage en hauteur de 32 mm, mais
toujours pas en profondeur. On apprécie aussi les pédales, un peu plus
propices à l'exercice du talon-pointe. La planche de bord converge vers
un tunnel et une console centrale plus proéminents aboutissant à un séduisant
design en T. Les encadrements chromés des 4 ouïes de ventilation contrastent subtilement
avec le panneau noir laqué qui s'étend sur toute la longueur de la planche de
bord. La console centrale s'inspire de la Mazda RX-8 mais
on regrette cependant l'emploi de plastiques durs et fragiles pour la partie inférieure
qui font réellement bas de gamme. Les ajustements et assemblages trahissent
également la parenté avec les moins bonnes réalisations actuelles de Ford, quel dommage. Les commandes, cadrans et commutateurs sont idéalement
positionnés pour une utilisation facilitée. Comme dans une Ferrari, les aiguilles
des compteurs sont en position 6 heures lorsque le contact est coupé. A midi,
on a les 5000 du compte-tours, ce qui laisse supposer que le moteur aime les tours.
Le volant à trois branches du roadster MX-5 NC arbore également un design très
agréable. Le coffre offre un volume de 150 litres, soit 6 litres de plus
que le précédent modèle. Divers nouveaux équipements rehaussent encore le confort
de conduite "à ciel ouvert". De petites vitres latérales empêchent les écoulements
d'air entre les montants et les rétroviseurs de pénétrer dans l'habitacle. Un
nouveau saut de vent en plastique monté (en série) derrière les sièges
réduit efficacement les turbulences provenant de l'arrière. Des ouïes au niveau
des hanches permettent de diffuser de l'air froid ou chaud sur les zones du corps
les plus sensibles. Notons à ce sujet que les nouveaux sièges disposent
d'une armature en offrant un excellent maintien latéral et lombaire. Les assises
de siège ont été également allongées. Les rares équipements optionnels
de la version de base (Elegance) incluent la peinture métallisée (450 euros),
l'intérieur cuir noir ou bi-ton avec sièges chauffants (1000 euros), le système
audio Bose® très sophistiqué (820 euros) et le système d'ouverture/démarrage
à carte + alarme antivol (490 euros).
MOTEUR
Le nouveau
Mazda MX-5 est disponible en deux motorisations essence quatre cylindres, 1,8L
et 2L, issues de la famille MZR. C'est bien sûr le 2 litres qui a retenu
notre attention. Ce moteur est étroitement dérivé de celui
équipant déjà la Mazda 3 2.0. Le bloc-cylindres, la culasse et le carter d'huile sont en aluminium,
tandis que les chemises sont en fonte pour une plus grande résistance. Le moteur
MZR a été raccourci de 69 mm par un repositionnement des bobines d'allumage et
d'autres systèmes auxiliaires. La hauteur du moteur a également été réduite de
6 mm et l'encombrement total du moteur a perdu 12 %. Il est aussi 5,4 kg plus
léger le 1,8 litre en fonte grise de l'ancien MX-5 grâce à
des pièces en plastique et le montage de la pompe d'assistance de direction
et du compresseur de climatisation directement sur le moteur. L'inclinaison du
moteur de 10° vers la droite dégage un espace suffisant pour loger les longs conduits
d'admission et le grand boîtier de répartition d'air de l'admission à débit variable bimode.
Les motoristes ont d'ailleurs travaillé à optimiser la circulation d'air (+57%)
dans le conduit d'admission et à réduire la contre-pression dans le conduit d'échappement
(-40%) par l'utilisation d'un silencieux de plus grande dimension, et d'une tuyauterie
d'échappement à deux sorties. Malgré tout, ce 2L 16 soupapes ne figure
pas parmi les premiers de la classe en matière de rendement. Le 2 litres
MZR ne développe en effet "que" 160 ch à 6 700 tr/min et un couple maxi
de 188 Nm à 5 000 tr/min, ce qui représente cependant un net surcroît par
rapport au précédent MX-5 FL 1,8 litre (140 ch). 90 % du
couple est disponible entre 2 500 tr/min et 6 700 tr/min mais à l'usage,
le moteur est bien plus à l'aise passé les 4000 tr/mn. Il grimpe
alors avec enthousiasme vers la zone rouge. Sur notre version Performance, le
2L s'accolle à une boîte manuelle à 6 rapports, dérivée
du précédent Mazda MX-5. Efficace et agréable, la boîte
de vitesse profite d'un bon étagement pour offrir au petit roadster de
belles performances. Le 6ème rapport est en revanche plutôt destiné
à l'autoroute, ce qui n'est pas le terrain de jeu préféré
d'un roadster !
CHASSIS
La quasi-totalité des nouveaux
véhicules actuels sont plus lourds que leurs prédécesseurs, compte tenu du durcissement
constant des normes de sécurité et du fait que les clients demandent sans cesse
de nouveaux équipements de confort. Mazda a souhaité inverser cette tendance,
ou du moins la freiner. Pour le développement de la caisse et du châssis du nouveau
Mazda MX-5, le cahier des charges proposé par le directeur du programme Takao
Kijima à son équipe ingénierie était en effet drastique ! Le moindre gramme superflu
a été traqué obstinément, à l'image du nouveau
rétroviseur intérieur pour lequel Mazda est fier d'annoncé
un allègement de... 84 grammes !! Malgré un plus haut niveau d'équipement
de série et une structure de caisse plus rigide, le nouveau Mazda MX-5 affiche
en effet un surpoids de seulement 10 kg par rapport à son prédécesseur. 58 % (en
poids) de toutes les pièces de la caisse sont réalisées en acier haute résistance
et ultra haute résistance. Résultat : une caisse nue de 247,5 kg, soit 1,6 kg
de moins que le modèle précédent. L'architecture de base avec moteur en position
centrale avant associée à la propulsion et à une répartition égale des masses
entre les essieux a été conservée. Comme son aîné, le nouveau Mazda MX-5
est équipé d'un cadre auxiliaire en aluminium embouti intégré au tunnel de transmission.
Sous forme de poutre, ce cadre auxiliaire s'inscrit entre l'extrémité arrière
de la transmission et le différentiel arrière; il supprime les torsions du châssis
lors des accélérations brutales. Ce cadre, véritable colonne vertébrale date du
coupé Mazda RX-7. Grâce à l'emploi d'aciers haute résistance,
la structure de caisse monocoque offre une rigidité accrue de 47 % en torsion
et 22 % en flexion par rapport au précédent modèle. Parallèlement, de nombreuses
pièces sont réalisées en aluminium, dont le capot moteur, le couvercle de coffre,
les bras de suspension avant, les porte-moyeux de roues arrière, les étriers de
frein et les cuvettes de ressorts de suspension arrière. A eux seuls, les bras
inférieurs de la suspension avant indépendante à double triangulation et la barre
stabilisatrice creuse ont contribué à réduire de 6,2 kg le
poids exercé sur le train avant. Associé à une répartition parfaitement
équilibrée du poids entre les trains avant et arrière due notamment au recul du
moteur de 135 mm et à un centre de gravité plus bas (446 mm), le principe de conception
allégée ont permis de réduire le taux de lacet de 2 %. Précisons
que plus le taux de lacet est faible, plus la réactivité du véhicule aux sollicitations
du conducteur est grande. La nouvelle suspension arrière multibras à 5
biellettes et amortisseurs monotube à gaz Bilstein tirent le meilleur parti
des jantes 17 pouces tandis que le différentiel à glissement limité (de série
sur la version 2 litres) rehausse encore le potentiel du châssis du Mazda MX-5 NC.
La cinématique de la suspension est conçue pour réduire la tendance naturelle
de la caisse d'un véhicule à plonger vers l'avant au freinage et à se cabrer à
l'accélération. Résultat : le facteur anti-plongée du nouveau roadster est réduit
de 38 % et le facteur anti-cabrage de 78 %. L'ABS et le contrôle dynamique de
la stabilité sont montés de série (selon le marché et la motorisation). Le diamètre
des freins avant à disques ventilés du roadster a été accru de 20 mm et celui
des freins arrière à disques pleins de 4 mm ; les flexibles, les étriers et le
servofrein ont par ailleurs été renforcés. Les essais réalisés en interne ont
permis de porter la distance d'arrêt à 38,4 mètres depuis 100 Km/h grâce à l'ABS
et au contrôle dynamique de stabilité. Enfin, notons que la direction hydraulique
à crémaillère du précédent modèle a été conservée. Toutefois, la direction du
nouveau MX-5 a été optimisée afin d'offrir moins de frottements, une meilleure
réponse linéaire et une plus grande rigidité.
SUR LA ROUTE
Ouverture
de la capote d'une main en quelques secondes, nous voilà prêts pour
tailler l'asphalte au volant de ce sympathique petit roadster japonais. La fusion
entre le cavalier et sa monture tant vantée par Mazda mérite bien
un parcours d'essai aussi sinueux que possible. Au lieu de se focaliser sur la
vitesse pure, même si le mx-5 atteint 210 Km/h, les développeurs
ont cherché à créer une fois encore un véhicule parfaitement équilibré,
taillé pour la conduite sportive et capable de procurer aux conducteurs les plus
émérites un superbe agrément de conduite malgré un moteur de moyenne cylindrée
pas trop puissant. L'accélérateur électronique très spontané et
un volant moteur allégé de 0,3 kg se combinent pour transformer les sollicitations
à la pédale en une accélération immédiate. Toutefois, la seconde moitié
de la course de la pédale de droite semble moins démonstrative.
Le 2L est à la fois souple et rageur, il ne rechignant pas à titiller
les 7000 tr/mn. Outre une consommation raisonnable (moins de 9L/100 de SP95 en
usage "normal"), ce moteur offre à travers sa double sortie d'échappement
une sonorité agréable mais assez quelconque. Les accélérations n'ont
rien de mollassonnes, 0 à 100 en 7"9, 1000 m DA en 29", et cheveux
au vent, les sensations sont toujours décuplées. La MX-5 NC se permet
tout de même de faire la nique à la BMW
Z4 2L, vendue beaucoup plus cher... La commande de boîte rapide et agréable
ajoute au plaisir d'enchainer les virage, tout comme la direction, très
directe, nous régale de sa précision. Moins mobile que l'ancien
modèle, le "MX5 mk3" présente un grand équilibre
bien aidé par des pneus accrocheurs. Prévenante et progressive,
elle glisse de l'arrière si on la brusque mais ne joue jamais de mauvaise
surprise, en tout cas sur le sec, même avec l'ESP déconnecté.
Le freinage profite quand à lui directement du poids restreint pour démontrer
une grande endurance et une bonne efficacité. On apprécie également
qu'il soit dépourvu d'aide au freinage d'urgence pour préserver
une bonne facilité de dosage. Autre atout : son confort très élevé,
trop même, à ce point que l'on attendait un châssis plus ferme
sur ce modèle Performance. Comparées à ses aînées,
les sensations sont ici très différentes. Quel que soit l'état
de la route, le comportement ne se détériore pas plus que le filtrage.
Un bon point pour arpenter le réseau secondaire français, pas toujours
irréprochable mais un bémol en ce qui concerne le feeling de la
route car nous avons l'impression d'en être désormais trop isolé.
Il suffirait sans doute pour y remédier de mettre des ressorts plus courts
et des amortisseurs un peu plus fermes.
SERIE LIMITEE
La série limitée "3ème génération" produite à seulement 3500 exemplaires dans le monde,
se distingue avec un coloris extérieur Rouge Velocity, son intérieur cuir rouge/noir,
sa calandre avant et son encadrement de pare-brise chromés et ses jantes spécifiques
de 17 pouces. Disponible en 2 litres uniquement.
:: CONCLUSION
Et oui malheureusement il faut rendre notre jouet ! Alors en guise de conclusion,
la Mazda MX-5 3ème du nom nous a globalement séduits. Les puristes
pourront lui reprocher d'avoir un peu perdu en caractère, elle est en revanche
encore plus polyvalente et homogène qu'avant. La "miata" n'a
rien perdu de sa joie de vivre et demeure le plus abordable petit roadster sportif
du marché.
CE QU'ILS EN ONT PENSE
:
"La nouvelle MX-5 a tout pour elle pour elle. C'est à la
fois l'automobile coup de coeur par excellence et l'achat le plus rationnel du
genre compte-tenu du rapport prix/prestations proposé et de la réputation
de fiabilité établie par les modèles précédents."
LE MONITEUR AUTOMOBILE - N°1358 - ESSAI MAZDA MX-5.
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