PLUS
C'EST LONG... ?
Depuis 1981, c'est Alessandro
de Tomaso qui est aux commandes de Maserati. Avec la Biturbo, il semble avoir
trouvé la bonne voie pour relancer la firme au trident alors bien mal en
point. Mais sa logique commerciale et de construction de gamme peut parfois donner
le tournis. Les dérivés sur base de Biturbo seront en effet nombreux
mixant à l'envie empattement, moteurs et finition. Dans cet imbroglio de
gamme, une belle inconnue est restée dans l'ombre : le coupé 228.
Une sorte d'anti-Karif, car si ce dernier était basé sur l'empattement
court des Spyder, le coupé 228 au contraire, se voulant cossu et luxueux
était basé sur la berline. Le coupé le plus long dans la
généalogie Biturbo
Texte :
Nicolas LISZEWSKI
Photos : D.R.
Après avoir repris la
firme au Trident, de Tomaso s'affaira à la remettre sur les voies du
succès. Ayant déjà sa propre marque éponyme à
côté, de Tomaso va construire
ainsi " sa " logique de gamme pour Maserati,
en prenant comme pilier central la Maserati Biturbo. Si l'archaïque Quattroporte
mk3 demeure encore au catalogue pour quelques années supplémentaires,
et seulement sur certains marchés, il manque à la Biturbo une classe
supplémentaire pour aller tâter du très haut de gamme. En
cylindrée, mais aussi en gabarit. Face à elle les coupés
Mercedes SEC (W126), BMW Série 6 ou
encore de Tomaso Longchamp et Maserati
Kyalami ne jouent pas dans la même cour. C'est donc avec un beau patchwork
technique et stylistique que de Tomaso va tenter de combler un vide dans le catalogue
Maserati avec le coupé 228. Basé sur l'empattement
des berlines, doté d'un V6 toujours biturbo de 2,8 litres développant
255 ch et offrant un visage plus doux et une esthétique qui se veut moins
brutale que le coupé Biturbo, le coupé Maserati
228 va connaître une carrière des plus confidentielle avec seulement
469 exemplaires produits. Totalement inconnu à l'époque, et encore
plus aujourd'hui, en raison d'une mise en production longue (près de trois
ans depuis sa présentation en décembre 1984 !), et d'un tarif surfait
comparé aux autres modèles de la marque. DESIGN
Vous trouviez la Maserati trop agressive et carrée ? Le coupé 228
est l'uvre du même designer, l'italien Pierangelo Andreani. Mais cette
fois-ci il a pu partir d'un empattement plus long de 2,6 m de berline. Comme souvent
dans ce type de situation, le coupé 228 est donc plus long que la berline
dont il dérive avec 4,46 m de long pour 4,40 m pour la berline
430. Le style est adouci avec notamment une proue totalement inédite
et spécifique à la 228. On trouve donc une
calandre épaissie et plus visible, mais surtout des clignotants ajoutés
sur les côtés des phares toujours carrés (en raison des normes
US très strictes à l'époque). Juste sous les blocs optique
avant, on distingue des prises d'air pour refroidir la bouillante mécanique.
Comme sur la Biturbo, les boucliers avant et arrière sont teints couleur
caisse sauf que pour la 228, la règle et l'équerre semblent avoir
été laissés au placard. La silhouette s'est sacrément
étirée, l'habitabilité arrière en profitant nettement
au passage, ainsi que la capacité du coffre. Mais si la Biturbo semble
ramassée et trapue, le coupé 228 semble presque déséquilibré
avec un pavillon qui remonte en hauteur vers la malle arrière, tandis que
cette dernière semble démesurément longue. De profil, c'est
assez amusant car le coupé 228 est véritablement l'opposé
du coupé Karif qui lui est basé sur le Spyder à l'empattement
raccourci de 2,4 m. Dans l'opération douceur de style, même les blocs
optique arrière sont plus lisse que ceux des Biturbo et berlines dérivées.
Trident Maserati sur la calandre et sur les montants de custode, entourages de
vitres chromés, rétros extérieurs peints ton caisse, jantes
alu de 15 pouces à voile plein
la Maserati 228 soigne son apparence
pour tenter de justifier une prix d'alors totalement étourdissant de près
de 450 000 francs (soit environ 70 000 euros).
A BORD DE LA MASERATI 228
L'habitacle demeure toujours baroque
à souhait et reste un des signes les plus caractéristiques des Maserati
produites sous l'ère de Tomaso. Finition luxe à l'italienne avec
cuir intégral plissé, boiseries, volant quatre branches, planche
de bord au design classique mais à l'équipement et instrumentation
complets. Les places arrière sont plus spacieuses on l'a vu, mais leur
accès est toujours acrobatique. La montre incongrue est toujours posée
fièrement au centre de la console centrale tandis qu'un clavier regroupant
la plupart des fonctions de bord et de confort est posé en dessous. La
position de conduite est bonne grâce à de multiples réglages.
A noter que le coffre à bagages est plus volumineux et autorise ainsi des
escapades à plusieurs plus lointaines. Une certaines idée du Grand
Tourisme à l'italienne en somme
MOTEUR
La Maserati 228 est le porte-drapeau de
la marque et elle a donc les honneurs d'étrenner le nouveau V6 de 2,8 litres
de cylindrée. Cette mécanique sera également partagée
par la suite avec le Spyder et la berline 430.
Par la suite, la 222 E (une Biturbo II 2,8 litres) et même les Ghibli et
Quattroporte 4 hériteront de cette brillante mécanique, avec des
évolutions notables. Pour la 228, on conserve la recette des Biturbo :
double petits turbos japonais IHI, deux échangeurs air/air (un par turbo),
culasse à trois soupapes par cylindres (deux d'admission et une d'échappement).
Sauf que désormais avec 2,8 litres de cylindrée, la puissance progresse
mais le rapport cheval par litre diminue comparé à celui volcanique
des plus de 100 ch/litre des V6 deux litres. Initialement, la 228 a été
dotée d'une alimentation par carburateurs double corps. La puissance revendiquée
était alors de 250 ch mais finalement la plupart des marchés ne
connaîtront que la version "iniezionze" (comprenez Injection et
prononcez "Iniézioné"...) Marelli-Weber. Finalement le
conducteur d'un coupé 228i avec injection et dépollution de série,
pourra compter sur 225 ch à 5 500 tr/mn et un couple de près de
40 mkg. Les performances annoncées par Maserati alors sont éloquentes
: 235 km/h en pointe, un 0 à 100 km/h en 5"6 et le kilomètre
départ arrêté en 26"3. En admettant une pointe d'optimisme
sur ces chiffres, toute transalpine, inutile de préciser que ces performances,
aujourd'hui encore forcent le respect. Côté transmission une boîte
mécanique ZF à 5 rapports était montée de série,
et l'option boîte automatique à 4 rapports pu être disponible
en cours de vie de la 228. La consommation reste copieuse, mais la 228 se montre
souple à l'usage grâce à un couple très conséquent
disponible à bas régime.
CHASSIS
Avec
une classique coque autoporteuse, les ingénieurs de Maserati ont greffé
les trains roulants et les éléments mécaniques. Sur l'essieu
avant, un ensemble de type MacPherson a été monté avec barre
stabilisatrice et amortisseurs téléscopiques à double effet.
Le train arrière est constitué de bras indépendants fixés
à une traverse ancrée à la coque par des éléments
flexibles, avec ressorts hélicoïdaux, amortisseurs à gaz à
double effet Bilstein et tampons supplémentaires en caoutchouc. Un différentiel
est également monté pour aider le pilote à laisser sur la
trajectoire la luxueuse Maserati 228. La direction passe par une classique crémaillère
tandis que les freins sont à disques, dont les deux avant ventilés
avec étriers flottants. Les jantes alu de 15 pouces sont chaussées
de pneus 205/55 VR 15 à l'avant et en 225 de large à l'arrière.
Malgré des efforts louables de Maserati sur les trains roulants et surtout
la motricité, le châssis est totalement dépassé par
la fougue du moteur. Les 40 mkg de couple mettent à mal la tenue de route
et le conducteur d'une Maserati 228 devra faire preuve de sérieuses connaissances
en pilotage pour pouvoir rouler vite sans se retrouver en-dehors de la route.
Les freins sont puissants, mais la sensation de la pédale est déroutante
au départ en raison d'une course très longue. La direction est en
revanche d'une précision diabolique, permettant ainsi de remettre l'auto
en ligne avec doigté. L'ABS ne sera jamais monté sur les 228i.
ACHETER
UNE MASERATI 228 Biturbo
Trouver une Maserati 228i aujourd'hui pourrait relever de la farce de prime abord.
Une rapide recherche sur les sites internet d'annonces spécialisées
pourra vous décourager car les 228 sont très rares sur le marché.
Il faut avouer qu'avec moins de 500 exemplaires diffusés, la 228 se fait
appeler "désir". Difficile par conséquent d'établir
une cote, d'autant plus que les frais de remise en état sont tellement
chers, qu'il ne faut parfois pas hésiter à payer le prix fort à
l'achat pour une tranquillité presque assurée pour la suite... Comme
souvent d'ailleurs pour ce type d'autos. Comptez donc entre 8 à 15 000
euros selon l'état. Le dernier prix donné devra concerner une auto
au passé limpide et à l'entretien prouvé. Que surveiller
à l'achat ? L'auto devra être complète avec tous ses accessoires
(certains sont spécifiques à la 228), en état de marche.
Livrets de bord et carnets présents de préférence. L'entretien
doit avoir été fait comme il se doit avec une révision tous
les 15 000 km, les courroies remplacées par précaution tous les
25 000 km, et des fluides de très haute qualité pour lubrifier comme
il se doit cette mécanique de précision. Les temps de chauffe doivent
être religieusement respectés, et ne jamais couper le moteur sans
attendre 2 à 3 secondes le temps que tous ces rouages survoltés
se calment. Inspectez bien la carrosserie qui n'est pas à l'abri de la
corrosion. En cas de points apparents ou non, de gros frais sont à prévoir.
Les gros kilométrages sont possibles à la seule condition d'un entretien
scrupuleux et d'un usage ad hoc !
CHRONOLOGIE
1981 : Alessandro de Tomaso rachète Maserati alors en difficulté.
En
mars au salon de Genève, présentation et commercialisation de la
première Maserati Biturbo qui cache sous une esthétique banale un
V6 bi-turbo de 2 litres de feu.
1984 : Présentation au salon
de Turin de la Maserati Spyder carrossée par Zagato.
En décembre,
Maserati présente le nouveau coupé 228, dotée d'un V6 biturbo
de 2,8 litres avec carburateur double corps.
1987 : Démarrage
de la production des Maserati coupé 228. Le marché français
n'a pas encore le droit à ce luxueux coupé.
1988 : Commercialisation
de la Karif, basée sur la plateforme du Spyder mais doté du "gros"
V6 biturbo de 2,8 litres.
1989 : Le marché français peut
enfin accueillir ce coupé italien. Mais désormais il est doté
de l'injection électronique et perd 30 ch dans la bataille avec l'adoption
du catalyseur.
En décembre, Fiat rachète Maserati à de
Tomaso.
Le 14 décembre, Maserati dévoile la Shamal, évolution
"surpuissante" des Biturbo Karif, avec un dessin plus agressif signé
Marcello Gandini.
1992 : Arrêt de la production du coupé
228 après 469 exemplaires.
PRODUCTION
Total
Maserati 228 1986-92 : 469 ex.
::
CONCLUSION
Vous voulez rouler
différent, et avec une pointe d'esprit averti, optez pour cette belle italienne.
La Maserati 228 a été oubliée, à l'ombre des Biturbo,
mais distille un charme bien à elle et certainement plus cohérent
par rapport à ses qualité dynamiques. Conduite Grand Tourisme, rapide
mais fluide, la Maserati 228 vous emmenera alors au bout du continent, dans une
ambiance que les allemandes n'ont jamais su adopter. Le charme latin en quelque
sorte, qui se mérite tout de même. Pas à l'achat, mais à
l'usage
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